Photo en noir et blanc, une femme de dos, la tête baissée, en proie à la tristesse..

Sur la dépression

La dépression est aujourd’hui un problème de santé publique qui ne doit pas passer inaperçu. Selon l’OMS, plus de 300 millions de personnes sont touchées par la dépression. Vieux comme le monde, ce mal qu’on appelait autrefois la mélancolie a toujours inspiré les artistes de tous horizons et la musique ne fait pas exception à la règle. Il permet aux uns de mieux comprendre émotionnellement de quoi il en retourne et aux autres d’actualiser leur mal-être et de se sentir moins seul. Je vous invite ainsi autour d’une ballade mélancolique, d’un morceau défouloir et d’un rap introspectif.

Stone Sour : le chant de l’amertume

Stone Sour est surtout connu pour être le projet parallèle de Corey Taylor, chanteur de Slipknot. Le groupe joue principalement un metal mélodique et très influencé par le grunge. Pourtant, dans le premier album éponyme sorti en 2002 figure une exception à la règle : Bother, une ballade qui semble propre mais qui porte un fond assez sombre.

Pour la petite histoire, le morceau était à l’origine crédité uniquement au nom de Corey Taylor. Cela pouvait être légitime au vu du minimalisme de l’instrumentation : une simple guitare au son clair complétée par des cordes et des chœurs et loin d’une formation rock complète avec guitares saturées, basse et batterie. Pourtant, par son côté sombre et mélancolique, j’ai pu voir des commentaires qui avaient le sentiment que Bother était bien plus lourd qu’un morceau de metal. Les paroles jouent certainement pour beaucoup : les débuts de couplet commençant par la voix d’un homme qui « souhaite avoir été trop mort » donne le ton de la chanson. Le texte se poursuit en évoquant des aspects tels que la mutilation, l’impossibilité de s’exprimer ou encore la vacuité de l’existence. Le chant de Taylor montre également une forme de vulnérabilité qui contribue à l’atmosphère lourde et mélancolique du morceau.

Wage War : pour évacuer

Parmi les arrivants les plus récents de la scène metalcore, Wage War joue dans la cour de ceux qui ne font pas dans la dentelle. Ils font partie de ce genre de petits groupes qui montent relativement vite : une signature chez Fearless Records, deux albums au succès relatif et de nombreuses tournées dont l’édition 2016 du prestigieux Warped Tour. Les floridiens décident d’entrer dans l’année 2019 avec le single Low, aussi écrasant que mélodique.

D’entrée de jeu, on reconnaît bien le style de Wage War : des riffs de guitares graves et lourds, des motifs rythmiques lents et un chant hurlé massif. Mais on peut quand même trouver une part de finesse dans ce morceau, à commencer par ses refrains. Par contraste avec la voix rageuse et pourtant teinté de fragilité de Briton Bond dans les couplets, le chant du guitariste Cody Quistad vient apporter un peu de mélodie et de lumière dans un morceau au contenu pourtant obscur. Les paroles se focalisent sur ce qui passe dans l’esprit d’une personne en dépression et des pensées qui l’enfoncent au plus bas, comme le suggère le titre. Il ne lui reste plus alors que la question qui clôture la chanson : « Qui peut me sauver lorsque je ne peux pas me sauver moi-même ? ». Si le morceau trouve quelques accalmies, Low représente bien la dépression qui explose et qui nécessite d’être évacuée, collant parfaitement avec le style de Wage War.

Kendrick Lamar : les démons du succès

Kendrick Lamar est un nom qui circule parmi les rappeurs les plus frais des années 2010. Après plusieurs mixtapes, il se propulse assez rapidement comme l’un des rappeurs les plus importants de sa génération, au point de se voir plusieurs fois affublé du titre de « nouveau roi du hip-hop ». Mais ce succès n’est cependant pas sans faille, ce que le californien cherche à montrer avec u, extrait de son album To Pimp a Butterfly.

Les paroles du morceau reflètent deux voix : celles des proche de Kendrick Lamar et celle de sa propre conscience. Dans les deux cas, elles sont clairement accusatrices et reprochent au rappeur de ne pas se soucier de ses proches alors qu’il cherche à transmettre des messages fédérateurs. Mais ce n’est pas seulement le texte qui frappe car son interprétation est particulièrement efficace. Sur une instrumentale saccadée, Kendrick Lamar prend successivement une voix rude collant au propos de ses proches et une autre clairement dépressive et qui déraille complètement. On comprend même que cette seconde voix est marquée par un alcoolisme désespéré en entendant quelques bruits de déglutition et de verre : Kendrick Lamar s’adresse à lui-même et s’accuse de son irresponsabilité et de son égoïsme. Finalement, ce morceau reflète bien l’auto-flagellation dont peut faire preuve un être dépressif et l’interprétation si particulière du texte suscite une grande empathie envers cet être.

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